Professeur spécialisé en économie des transports à TSE, Marc Ivaldi évoque plusieurs pistes pour lutter contre l'autosolisme qui touche la majorité des conducteurs.
L'autosolisme semble être devenu le mode préféré des conducteurs, à une époque où la réduction des gaz à effet de serre dans l'atmosphère est plus que jamais indispensable?
C'est le problème essentiel. Car les émissions de CO2 du transport,c'est la voiture. C'est aussi l'avion, mais dans une moindre mesure : c'est 5 % des émissions de CO2. La voiture est à 60/ 65 %. En effet, l'utilisation de la voiture est le problème central. Je suis absolument étonné, d'ailleurs, qu'on ne mette pas les choses en parallèle. On parle de l'augmentation du prix de l'essence, mais on a oublié ce qui s'est passé cet été qui montre que le réchauffement climatique est devenu important. Faire baisser le prix de l'essence, c'est augmenter l'utilisation de la voiture et donc les émissions de CO2. Je ne comprends pas pourquoi tous les partis politiques proposent des solutions pour faire baisser le prix de l'essence
Comment expliquez ce phénomène du conducteur seul au volant qui résiste au covoiturage ? Les statistiques de Vinci sont connues depuis longtemps. Tous les déplacements à moins d'un km, dans leur grande majorité, se font en voiture. Je prends ma voiture pour emmener mon enfant à l'école, qui est parfois près du domicile, ensuite je prends ma voiture pour me rendre au travail. Donc, je me retrouve seul en voiture. Pourquoi ce mode de déplacement est plébiscité ? Parce que la voiture est le mode de transport le plus flexible. Il est toujours là. En banlieue, il est devant la maison. Je peux donc partir à tout moment. Ce n'est pas comme aller à la gare et attendre le prochain train. C'est un outil flexible qui le restera. On ne pourra donc jamais réduire le nombre de véhicules pour lutter contre le réchauffement climatique ? Ce sera très difficile de se passer de cette flexibilité. Même si toutes voitures sont électriques, on enlève de la pollution mais on n'enlèvera pas le fait qu'il y aura toujours des embouteillages. Ce qui veut dire qu'on utilisera plus d'électricité, donc il faudra plus d'énergie nucléaire, solaire. On déplace le problème. Contrairement à ce que pensent les écologistes, il faudra continuer d'investir dans les infrastructures routières.
Article paru dans La Dépêche du Midi, le 23 septembre
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